L’interview de Guilhem Astre, président et co-fondateur du laboratoire de contrôle de l’exposition aux champs électromagnétiques EXEM

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Guilhem Astre, président du laboratoire EXEM, présente la solution de supervision
de l’exposition des citoyens et de l’espace public aux ondes électromagnétiques.

Découvrez comment EXEM, laboratoire d’essai pour la mesure des champs électromagnétiques,
utilise les technologies de l’information et de la communication pour améliorer la qualité des services
urbains au travers de l’Observatoire des Ondes ; l’outil de supervision de l’exposition des citoyens et
de l’espace public aux ondes électromagnétiques.


Pour introduire l’enjeu lié à l’exposition aux ondes électromagnétiques, pourriez-vous
nous présenter les activités d’EXEM et ses particularités ?

Fondé en 2010, EXEM est un laboratoire de contrôle spécialisé dans l’exposition des personnes aux
ondes électromagnétiques. En 2012, nous démarrons notre activité commerciale après avoir obtenu
une accréditation en tant que laboratoire d’essais. En 2014, nous commençons à travailler pour
l’Agence Nationale des Fréquences (ANFR) pour réaliser les mesures d’exposition dans le cadre du
dispositif de surveillance des ondes électromagnétiques mis en place par le décret 2013-1162.

president-directeur-general-exem

Ce dispositif permet à tous les Français de faire réaliser gratuitement une mesure d’exposition aux
ondes électromagnétiques dans leurs habitations. Les collectivités peuvent aussi en bénéficier afin
d’évaluer l’exposition de leurs administrés dans les lieux publics mais également dans les lieux
sensibles comme les écoles, les crèches, etc. Depuis 2014, EXEM réalise la plupart des mesures
d’exposition en France dans le cadre de ce dispositif et l’ANFR vient de renouveler sa confiance pour
les 4 prochaines années.

 

Combien de personnes par an font appel au dispositif gratuit de mesure d’ondes
électromagnétiques proposé par l’ANFR ?

 

En 2021, dans le cadre de ce dispositif de surveillance encadré par l’ANFR, nous avons réalisé environ
10 000 mesures sur le territoire français
. 5 000 à la demande du grand public et des villes pour
contrôler les lieux habitations et les lieux publics. 5 000 à la demande du gouvernement, en marge
du déploiement de la 5G, pour répondre aux recommandations de l’ANSES qui préconise, dans son
rapport datant de 2021, de suivre l’évolution de l’exposition au fur et à mesure du déploiement du
réseau 5G et de sa montée en charge.

 

 

Etes-vous le seul opérateur au niveau national à réaliser ces mesures d’ondes électromagnétiques ?

 

Aujourd’hui, nous réalisons dans le cadre de l’application du dispositif de surveillance des ondes,
l’ensemble des mesures en France métropolitaine. Les DOM-TOM sont couverts par un autre
titulaire.
Notre activité ne se limite cependant pas aux prestations réalisées pour le compte de l’ANFR. Nous
intervenons également sur le marché du contrôle de l’exposition des travailleurs, dont le cadre
réglementaire a été fixé par décret en 2017. A ce titre, nous réalisons en milieu industriel et tertiaire
des prestations consistant à recenser et mesurer les sources émettant des ondes afin de vérifier la
conformité avec la réglementation en vigueur. Nous accompagnons également les acteurs du
numérique pour contrôler la conformité des infrastructures déployées en indoor. Enfin, une partie de
notre offre est dédiée au milieu du bâtiment pour accompagner les professionnels du milieu du
diagnostic et de la certification HQE bâtiments durables.

 

 

Vous serez présent au salon Innopolis 2022, mais comment votre laboratoire de
mesures des ondes électromagnétiques s’inscrit dans une démarche de Smart City ?

 

Nous participons au salon Innopolis Expo 2022 pour présenter notre solution de supervision en
continu de l’exposition aux ondes : Observatoire des Ondes. En 2016, nous avons compris qu’une
telle solution représentait un réel enjeu sociétal.
Bien que nous intervenions dans le cadre du dispositif ANFR pour réaliser des mesures ponctuelles
caractérisant l’exposition au moment où nous les faisons, nous avons senti qu’il y avait un besoin de
comprendre comment l’exposition aux champs électromagnétiques évolue dans le temps. Nous
avons donc lancé, à cette époque, un projet de R&D financé sur fonds propres afin de développer une
solution intelligente pour superviser les ondes électromagnétiques dans la ville.
Notre outil de supervision prend la forme de capteurs intelligents qui ont été pensés pour un
déploiement simple et rapide sur le mobilier urbain. En effet, note capteur WAVE-001, autonome en
énergie, permet de mesurer l’évolution de l’exposition globale pendant 6 ans avec une maintenance
réduite et se positionne ainsi comme la solution idéale en réponse aux recommandations de l’ANSES.

 

capteur-observatoire-des-ondes

Pour cela, nous réalisons 12 mesures par jour, soit une toutes les 2 heures. Notre laboratoire a réalisé
de nombreuses études qui ont démontré que cette configuration permettait d’avoir une très bonne
représentativité de l’évolution de l’exposition dans la journée. En parallèle de ce développement
hardware, nous avons également travaillé sur la partie logicielle afin d’exploiter les données
mesurées en toute simplicité. Nous avons donc développé une plateforme privée, Supervision,
permettant à nos clients d’exploiter les mesures. Celle-ci est accessible comme un site web avec accès
restreint.
Au-delà de cette solution, nous avions la volonté d’apporter un véritable outil de communication
entre les collectivités et les citoyens en rendant la donnée accessible simplement. Nous avons donc
imaginé une deuxième plateforme, accessible par le grand public, dédiée à la consultation des
mesures réalisées par l’ensemble de nos capteurs mais aussi à la vulgarisation des ondes
électromagnétiques à travers une section pédagogique.

 

Vous pouvez donc vous rendre sur le site www.observatoiredesondes.com pour consulter les
différentes mesures réalisées sur notre territoire. Finalement, en 2020, nous avons lancé notre offre
de services sous format SAAS dans laquelle nous mettons à disposition l’ensemble de la solution
(capteurs, plateformes…) dans le cadre d’un abonnement périodique (mensuel ou trimestriel).

 

Toutes les collectivités avec qui vous travaillez publient leurs données sur votre plateforme
publique de l’Observatoire des Ondes ?

 

Dans le cadre de notre prestation, les collectivités peuvent choisir de rendre publiques toutes, ou une
partie, des données collectées. Bien que nous conseillions à nos clients de s’inscrire dans une
démarche de transparence car notre solution est un véritable outil de communication avec les
citoyens qui favorise le débat sociétal.

carte-des-capteurs-observatoire-des-ondes
 

De notre côté, nous respectons une charte de déontologie vis-à-vis du positionnement des capteurs.
Il n’est pas envisageable de retenir des emplacements qui seraient motivés par une minimisation de
l’exposition électromagnétiques.

 

Lorsque vous travaillez avec des collectivités, comment s’organise le choix de l’installation des
capteurs ?

 

Dans le cadre de notre prestation nous accompagnons nos clients pour définir un plan de
déploiement de notre solution. Nous étudions avec eux les emplacements des capteurs en prenant
en compte leurs objectifs, souvent motivés par des enjeux démographiques, sociétaux, mais aussi
techniques. Certaines villes priorisent par exemple un déploiement de capteurs à proximité des
émetteurs 5G pour encadrer le déploiement du numérique quand d’autres villes sont concentrées sur
le contrôle d’établissements sensibles comme les crèches ou les écoles.

 

Une fois le plan de déploiement finalisé, nous installons ces capteurs sur le mobilier urbain, de
préférence les candélabres. En effet, ce sont les mobiliers urbains les plus présents dans les rues et les
plus adaptés à l’installation de nos capteurs. En général, nous travaillons avec les services d’éclairage
public pour faire les installations. La conception de nos capteurs permet de déployer une quinzaine
de capteurs par jour.

 

 

Comment fonctionnent les capteurs de l’Observatoire des Ondes ?

 

Les capteurs mesurent l’intégralité des contributions électromagnétiques sur la bande des radio
télécommunications. Ils envoient ensuite leurs données sur nos serveurs, via le réseau Sigfox, qu’on
appelle le réseau ‘0G’. Cette technologie est vraiment adaptée à la transmission MtoM (Machine to
Machine) de données en faible quantité.

 

Mais le point fort réside dans le fait que les composants Sigfox ne sont pas gourmands en énergie.
Ceci nous permet donc de proposer une autonomie de plus de 6 ans à nos clients. Même si Sigfox est
déployé dans plus de 60 pays, nous proposons aujourd’hui d’autres technologies de communication
comme LoRA, GPRS, 4G-LTE, 4G-LTE-M, etc. afin de nous adapter aux besoins et contraintes de nos
clients.

 

Quelles sont les types d’ondes mesurées par ces capteurs ?

 

Les capteurs mesurent l’ensemble des radiofréquences incluant toutes les technologies de la
téléphonie mobile, la radio FM, la TNT, le Wifi… La donnée mesurée est donc représentative de
l’exposition aux ondes présentent dans notre environnement direct.

 

Avec combien de collectivités travaille EXEM à ce jour ?

 

Le service a été lancé officiellement fin 2020 et nous travaillons déjà avec une douzaine de collectivités
en France, dont Nantes Métropole, Bordeaux Métropole, Eurométropole de Strasbourg, Grand Paris
Sud et les villes de Rennes, Orléans, Mulhouse, Lille, Marseille, Massy, etc. Nous avons aussi déployé
40 capteurs à Bruxelles !

 

Nous accompagnons également des projets innovants comme Paris2Connect en partenariat avec la
ville de Paris et notre solution est également utilisée dans le cadre de programme de recherche
comme celui de l’Ecole Télécom ParisTech qui a déployé des capteurs sur le territoire de la ville de
Massy pour travailler sur le data mining.

 

Nos principaux clients restent cependant les collectivités. Il est important de préciser aussi que nous
avons commencé à déployer nos capteurs dans des projets indoor (bureaux tertiaires, crèches…).
Nous croyons que ce marché va également se développer.

 

Combien de capteurs en moyenne faut-il déployer pour une métropole de 30 à 60 000
habitants ?

 

Ce déploiement va dépendre de la volonté de la ville. Si une ville veut expressément superviser les
écoles, le nombre de capteurs sera conditionné par le nombre d’établissements à couvrir. Mais pour
une couverture du territoire sur l’espace public, à proximité des émetteurs 5G, je dirais qu’une
centaine de capteurs sur la ville de Toulouse permettrait d’avoir une bonne représentativité de
l’exposition des Toulousains sachant que la ville compte environ 400 supports accueillant des
émetteurs de téléphonie mobile.

 

C’est la première année que vous participerez au salon Innopolis Expo, quel est
l’objectif d’EXEM pour cet événement ?

 

Il faut savoir qu’EXEM est une société d’ingénieurs, comme moi qui suis originaire de la recherche,
avec une vision très technique. Ceci nous a permis de proposer à nos clients des prestations de
mesures de haute qualité qui font aujourd’hui notre réputation. Mais par rapport à son potentiel,
EXEM souffre d’une visibilité assez faible car jusqu’à récemment, cela n’avait pas été dans nos priorités
historiques de croissance.
Aujourd’hui, nous souhaitons accélérer notre développement sur d’autres activités en France et à
l’International. Pour accompagner cette croissance nous nous appuyons sur de nouveaux
collaborateurs d’expérience comme Stéphane Bloquet par exemple, notre Directeur du
Développement Commercial, ou encore sur des Business Développeurs et une Responsable
Marketing et Communication. Nous souhaitons donc, à travers le salon Innopolis Expo, accroître notre
visibilité et renforcer notre notoriété auprès d’un de nos public cible.

 

Comment présentez-vous aux collectivités l’enjeu que représente la mesure de
l’exposition aux ondes électromagnétiques ?

 

L’enjeu est principalement d’accompagner ce fameux débat sociétal, qui aujourd’hui est controversé,
notamment avec le développement de la 5G. Aujourd’hui, les citoyens ont besoin de transparence et
de données aussi factuelles que simples à comprendre. C’est là le premier intérêt de l’Observatoire
des Ondes, avec des données vulgarisées et transparentes. Nous proposons l’Observatoire des Ondes
comme un outil qui permet d’encadrer le déploiement du numérique dans le respect de l’exposition
des citoyens.

 

Avez-vous senti un intérêt grandissant pour EXEM de la part des villes qui ont promis plus de
débat public avant d’accepter le déploiement des antennes 5G sur leur territoire ?

 

Oui, tout à fait. L’Eurométropole de Strasbourg, ou encore Nantes Métropole, se sont inscrits dans
une démarche de consultation publique, allant jusqu’à la signature de chartes intégrant les
opérateurs de téléphonie mobile par exemple. Et en complément, elles ont souhaité déployer
l’Observatoire des Ondes, justement pour nourrir, en données et en transparence, ce débat-là.
Cet outil permet aux villes d’avoir une vraie stratégie de supervision du déploiement des émetteurs
et permet, en temps réel, de savoir comment l’exposition évolue sur les sites existants et sur les
nouveaux sites.

 

Concernant les recherches en cours, en particulier celles de l’ANSES, ont-elles de
l’influence sur l’intérêt pour les services d’EXEM ?

 

Oui bien sûr. Le rapport de l’ANSES de 2021 préconisait de suivre l’exposition aux ondes
électromagnétiques au fur et à mesure du déploiement du réseau et de sa montée en charge. Il faut
bien comprendre que le réseau 5G commence à être déployé, mais qu’il n’est pas encore utilisé à sa
pleine mesure.

 

Notre solution permet donc de répondre parfaitement aux recommandations de l’ANSES en
permettant aux collectivités de suivre l’évolution dans le temps de l’exposition aux ondes. Elle leur
apporte ainsi une solution simple et parfaitement en ligne avec les recommandations.

 

Comment vous positionnez-vous auprès des villes qui s’interrogent sur les niveaux d’exposition aux ondes, au-delà de la simple observation ?

 

Bien que nous soyons des spécialistes de la mesure de l’exposition, nous n’avons pas de réponse ou
de conseil à donner sur les niveaux d’expositions. Nous appliquons strictement la loi française, qui
définit les niveaux limites d’exposition pour les différentes sources. En complément de la
réglementation, l’ANFR a également mis en place un seuil atypique (6 V/m), qui est défini comme un
niveau substantiellement supérieur à la moyenne nationale. Cette précaution met en lumière les
enjeux sociétaux liés à la surveillance de ces niveaux.
En cas de dépassement de ce seuil atypique, des actions sont à engager. L’Observatoire des Ondes
permet de détecter un dépassement éventuel de ce seuil et de lancer une alerte vers la collectivité.

 

EXEM propose-t-il un accompagnement en cas de dépassement du seuil atypique ?

 

En cas de dépassement d’un seuil atypique ou réglementaire mesuré par notre solution de
supervision, notre première action consiste à vérifier cette valeur en réalisant une mesure de type
accréditée. Cette mesure réalisée par nos techniciens en radiofréquences va permettre d’officialiser
le dépassement et surtout, de nous communiquer des informations précieuses sur les contributeurs
à ce dépassement.

A partir de là, une action sera entreprise entre les différents acteurs (collectivité, opérateur et
régulateur) pour solutionner le problème. Evidemment, EXEM pourra intervenir ensuite pour vérifier
que la solution mise en place (comme la réduction de la puissance de l’émission d’une antenne) est
efficace.

 

Comment EXEM traite les sujets de l’électrosensibilité, et des cas de demande de
protection vis-à-vis des émissions ?

 

Nous ne sommes pas compétents sur le sujetsanitaire car notre métier consiste à contrôler les niveaux
d’expositions par rapport aux limites réglementaires. Nous laissons des spécialistes comme l’ANSES
travailler sur ce sujet. Nous ne sommes pas qualifiés pour commenter le débat ou accompagner les
personnes concernées. En revanche, nous sommes compétents quand il y a besoin de mesurer et
contrôler.

En fonction de futures décisions à ce sujet, il est tout à fait possible d’imaginer, demain, des villes
mettant des zones blanches en place. Dans ce cas, nous pourrions contrôler ces zones pour s’assurer
que les niveaux sont suffisamment bas.

 

Selon vous, comment le débat lié au déploiement de la 5G et des appareils connectés
va évoluer dans les prochaines années ?

 

En tant qu’ingénieur dans le domaine, j’analyse les choses de manière pragmatique. Les gens qui sont
anti 5G doivent savoir que le réseau 4G est aujourd’hui saturé. En effet, les utilisateurs, toutes
générations confondues, consomment de plus en plus de données, et cela ne va pas aller en
s’améliorant. C’est une quasi-certitude, à moins que la société ne change radicalement.
Partant de ce constat il est préférable de disposer d’un réseau calibré pour accueillir cette
consommation, que de saturer un réseau 4G qui risque également de poser des problèmes
d’exposition. La 5G permet de transmettre plus rapidement les données à la personne qui les a
demandées. Donc, aujourd’hui je ne sais pas le dire, mais peut-être que la 5G permettra dans un
premier temps de baisser les niveaux d’exposition et que nous connaîtrons une augmentation des
niveaux au fur et à mesure de l’apparition de nouveaux usages sur le réseau. C’est ce que l’analyse
des données de nos capteurs et des campagnes de mesures que nous menons pour l’état nous diront.

 

C’est pour cela que notre système est utile. Il va permettre de vérifier cela et d’agir en conséquence.
Nous ne savons pas encore quel sera l’impact de la 5G. Il est donc nécessaire de suivre cela de très
près.

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